samedi 28 décembre 2013

L’Afrique à l’heure de toutes les convoitises

Salim METREF



Parmi les séquelles de la colonisation de l’Afrique, deux symptômes, devenus de véritables marqueurs des pays de ce continent qui ont accédé à l’indépendance, sont à méditer. L’émergence de régimes autoritaires obnubilés par l’usage de la force et de la répression systématique des libertés et le silence complice des élites qui souvent s’accommodent des souffrances infligées à leurs peuples et pire se métamorphosent souvent, fascinées et asservies, en bras articulé des anciennes puissances coloniales. Ces situations de « néocolonialisme résurgent » contribuent souvent à disloquer ces pays et à redonner du souffle aux nouvelles visées prédatrices des puissants de ce monde. Les conflits qui minent l’Afrique, attisent les convoitises et suscitent l’attention de la communauté internationale et des Nations-Unis sont souvent révélateurs et résultent des effets de ces pathologies postcoloniales dévastatrices. Ces dernières induisent pauvreté des populations, populismes, déliquescence des institutions, exacerbation souvent délibérée des différences religieuses et culturelles, exaltation des chauvinismes et nourrissent guerres civiles et conflits ethniques. Elles servent également d’alibi à de nouvelles conquêtes qui ne disent pas leur nom mais qui dans leur essence n’ont rien à envier à celles du passé et qui se font toujours au nom du libre commerce et de la mission civilisatrice de l’homme blanc.

La nouvelle reconfiguration des zones d’influence dans le monde se précise au grand dam des partisans de la solidarité entre tous les peuples de la planète, de l’effort partagé, de la protection de la Terre et de ses ressources et de l’entraide. Elle s’accompli cependant avec une nuance de taille. Les puissances économiques et militaires issus des rapports de force induits par la fin de la seconde guerre mondiale doivent à présent compter avec l’apparition de nouveaux trublions, appartenant le plus souvent au cercle des pays dits émergents qui contestent cet équilibre et l’existence de ces véritables chasses gardées.

L’Afrique, continent riche en couleurs, en pétrole et en métaux précieux aiguise les appétits. Ce continent constitue l’une des dernières proies que convoitent des prédateurs de plus en plus affamés. Car il faut relancer les économies occidentales en grandes difficultés et créer de l’emploi. L’Afrique constitue dans ce contexte une opportunité formidable pour les entreprises étrangères. Il faut exporter vers ce continent. L’Afrique doit acquérir et consommer les excédents des puissants qui à leur tour prospèrent et font prospérer leurs pays. La mécanique est ainsi bien rodée. Mais le grain de sable que constitue l’apparition d’un monde multipolaire enraye le mécanisme.

Il faut désormais réinventer les guerres et supporter l’effort financier de plus en plus important qu’elles induisent. Les interventions militaires récurrentes en Afrique conduites par ailleurs avec ou sans mandat des Nations-Unis affaiblissent des économies occidentales déjà très mal au point. 

La parade est cependant trouvée. Il faut inviter les africains à se défendre eux-mêmes non pas en se démocratisant et en se développant, la prospérité économique et le développement humain étant le meilleur garant de la paix et de la sécurité, mais en créant une force d’intervention rapide qui se déploiera dans toutes les parties du continent avec tout ce que cela comporte comme risques d’embrasement entre pays voisins.

La République Centrafricaine et la RDC constituent désormais et après la Libye et le Mali, le nouveau point de fixation des stratèges occidentaux qui définissent le cap et suggèrent, comme par exemple pour ceux qui en France s’inspirent des maitres à penser de l’interventionnisme que furent Richard Pearl et Paul Wolf witz, depuis longtemps, aux troupes françaises d’intervenir en Afrique dés qu’un conflit surgit, s’installe dans la durée ou présente, selon la terminologie convenue, une menace pour la stabilité de toute la région.

Cette nouvelle doctrine dont les contours ont été esquissés à l’occasion du sommet franco-africain, rebaptisé sommet Elysée-Afrique, sous la forme d’une nouvelle approche de la politique africaine de la France qui « associe les pays africains à la maitrise de leur propre destin ». Prétendue sans parti pris et au service exclusif des peuples en détresse, cette nouvelle approche est portée par le déploiement de forces au sol pour créer de nouveaux rapports de forces. Encore une fois, cela semble ressembler à mettre la charrue avant les bœufs car les peuples africains sont le plus souvent victimes de leurs propres dirigeants et du sous-développement qu’ils provoquent.

Le sommet de Paris qui a eu pour maître de cérémonie le Président Français avec comme guest star le Président sénégalais qui a l’occasion s’est approprié dans son intervention le projet de gazoduc Algérie – Nigéria pour en faire un plaidoyer pour l’intégration régionale a tenté de répondre laborieusement à la récurrente question de savoir qui du développement économique ou de la sécurité est le meilleur le garant de la paix sociale ?

L’Afrique doit apprendre à assurer seule sa propre sécurité et sans apport extérieur. L’histoire nous enseigne hélas que toutes les expéditions mêmes les plus « nobles et les plus généreuses » se sont toujours transformées en boulets pour les peuples autochtones qui les ont subies. Et hasard du calendrier, deux personnes ont quitté ce monde à quelques jours d’intervalle. L’une à consacré sa vie à la lutte pour la conquête de la liberté et la fin de l’asservissement, l’autre a confondu les genres et a institué, sous les ordres de ses supérieurs hiérarchiques surtout politiques, la pire des souffrances que l’on puisse infliger à l’homme. Pour les peuples africains, le choix entre Mandela et Aussaresses doit être longuement médité.

Salim METREF




jeudi 19 décembre 2013

Lettre ouverte à la SADC et à la Communauté Internationale - Demande de disqualification des candidats qui ont outrepassé la loi électorale

Lettre ouverte à la SADC et à la Communauté Internationale

Demande de disqualification des candidats qui ont outrepassé la loi électorale


Nous voulons rappeler à l’ensemble de la Communauté Internationale que vous avez entraîné Madagascar dans une situation inextricable qui n’apportera aucune solution durable à la présente crise. Pour preuves:

- vous avez favorisé l’exécution sélective de la feuille de route où seules les dispositions à l’avantage du régime putschiste notamment avoir accordé le plein pouvoir à Andry Rajoelina,

- Andry Rajoelina se permet de changer les lois, juste avant le deuxième tour pour s’assurer une place de premier ministre au mépris de toute considération légale.

- vous avez obligé les Malagasy à accepter la tenue des élections en pleine saison de pluie; élections qui ne sont ni libres ni transparentes et encore moins démocratiques en raison de leur caractère exclusif qui a scandaleusement empêché les candidats de l’opposition d’y participer,

- les institutions (CES, CENIT, HCC) chargées d’organiser et de contrôler ces élections ne présentent point les conditions de neutralité et d’indépendance requises, elles sont toutes favorable au régime putschiste,

- lors du premier tour, la société civile a fortement dénoncé l’existence de fraudes électorales massives dans les régions éloignées et qui sont facilitées par ces mêmes institutions, notamment la CENIT,

Tout dernièrement, Andry Rajoelina n’a pas hésité à violer l’obligation légale de neutralité (avec un simple décret n° 2013-593 du 06 août 2013) qui s’impose à lui  en participant activement et publiquement aux campagnes électorales. C’est seulement en fin de campagne électorale (à deux jours du scrutin, le 18 décembre) que la CES a annulé le décret en question.

Au vu de ces éléments,

  • Et compte- tenu de la rétroactivité de l’annulation du décret susmentionné, nous demandons la disqualification du candidat à la présidentielle Hery Rajaonarimampianina et de tous ceux qui appartiennent ou se présentent aux législatives sous l’étiquette du groupe MAPAR qui, par conséquent, se trouvent également dans l’illégalité.
  • En tant que garant du processus de sortie de crise comme le précise la feuille de route, la SADC mais aussi la Communauté Internationale (GIC-M) doivent réagir avec la plus grande fermeté contre les manœuvres et mauvaise foi récurrentes des putschistes, en application de l’article 43 de la feuille de route. En cas de crise post électorale, la Communauté Internationale aura sa part de responsabilité.



Enfin, nous voulons porter à votre connaissance que, pour le Peuple malagasy, nous portons plainte contre les multiples atteintes à notre souveraineté nationale qui ont pour conséquences une situation chaotique sans précédent et un avenir fortement compromis.


GTT International – Genève
Collectif des Patriotes Malagasy
15 rue des savoises - 1205 Genève (CH)



Annexe

Extrait de la feuille de route pour Madagascar


Article 15. Le Président, le Gouvernement, les Chefs d’institutions et l’ensemble de l’administration de la transition doivent rester neutres dans la période de transition, en particulier dans le processus électoral;


Article 39. Sous l’égide de l’Équipe de Médiation de la SADC, appuyée par les Nations Unies, la communauté internationale sera chargée du suivi et du contrôle internationaux de la mise en œuvre de cette feuille de route, en collaboration avec les acteurs nationaux et internationaux pertinents;


Article 43. En cas de graves violations de cette Feuille de Route les partenaires examineront la possibilité de prendre des sanctions contre les auteurs de ces violations, qu’ils soient ou non signataires de la présente Feuille de Route;


Extrait du Code Electoral


Art. 134 - Sur demande de tout intéressé ou sur constatation de la Commission Electorale Nationale Indépendante ou de ses démembrements au niveau territorial, toute autorité politique, tout fonctionnaire d'autorité, civile ou militaire, candidats à une élection, ayant usé des prérogatives de puissance publique dont ils disposent pour influencer le choix des électeurs peuvent être disqualifiés.
La disqualification du candidat incriminé ou de la liste de candidats à laquelle il appartient, suivant les modalités de scrutin de la catégorie d'élections concernées, peuvent être prononcée par la juridiction compétente dans un délai de quinze jours après le jour du scrutin si elle estime que les charges contre le candidat incriminé sont avérées fondées.
Le jugement du Tribunal administratif rendu en matière de disqualification est susceptible de pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat dans un délai de trois jours à compter de la notification. La Cour statue dans un délai maximum de sept jours à compter de la saisine.
Tout candidat ou liste de candidats qui tombe sous le coup de l'article 157 ci-dessous, encourt en outre la disqualification.


dimanche 15 décembre 2013

La Françafrique n’est pas morte, elle est bien vivante à Madagascar (suite)

Mise à jour à la date du 15 décembre 2013, à 5 jours du 2ème tour de la présidentielle et des législatives.




Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance

Adoptée en janvier 2007 et entrée en vigueur le 15 février 2012, soit trente (30) jours après le dépôt du quinzième instrument de ratification (le 16 Janvier 2012) par la République du Cameroun, conformément à l'article 48 de la Charte.



La Charte se fonde sur les valeurs universelles de démocratie, de respect des droits humains, de l’Etat de droit, de la suprématie de la Constitution et de l'ordre constitutionnel dans les mécanismes politiques des États. La Charte met l'accent sur l'importance des missions d'observation pré-électorale, d'observation électorale et des missions consultatives spéciales ainsi que sur la nécessité de créer un environnement propice à la mise en place de mécanismes nationaux, indépendants et impartiaux de suivi ou d'observation.

La Charte aborde entre autres questions, celles relatives aux changements anticonstitutionnels de gouvernement qui constituent la principale cause de conflits violents en Afrique. Elle énonce des mesures de renforcement des institutions et des processus  électoraux afin d’assurer des élections libres, transparentes et démocratiques en rejetant et en condamnant les changements anticonstitutionnels de gouvernement.

La Charte souligne également l'obligation d'assurer l'indépendance du pouvoir judiciaire, la promotion des meilleures pratiques dans la gestion des élections afin d’aboutir à la stabilité politique et à la bonne gouvernance, l'obligation d’organiser des élections libres, transparentes et démocratiques, conformément à la Déclaration de l'Union africaine sur les principes régissant les élections démocratiques en Afrique, à travers la création et le renforcement des organes électoraux nationaux, indépendants et impartiaux, le renforcement des mécanismes nationaux de règlement des litiges électoraux, un code de conduite contraignant pour les acteurs politiques, ainsi que l'accès libre et équitable par les partis politiques aux médias d'Etat pendant les élections.


La Charte sous-tend également, entre autres, les valeurs relatives aux droits humains fondamentaux, l'élimination de toutes les formes de discrimination, la promotion des droits des femmes, des minorités ethniques, des migrants, des personnes handicapées, des personnes déplacées et des autres groupes sociaux vulnérables marginalisés, en promouvant la bonne gouvernance, l’Etat de droit et l'établissement d'institutions publiques renforçant la démocratie et l'ordre constitutionnel.

La Charte reconnaît le rôle de la société civile, du secteur privé, des femmes, des groupes sociaux ayant des besoins spécifiques, les jeunes et les personnes handicapées dans le processus de développement et de gouvernance ainsi que dans le suivi et la mise en œuvre de la Charte.


La Commission invite tous les États membres, à prendre les mesures nécessaires pour institutionnaliser la bonne gouvernance économique et des entreprises et d'incorporer les dispositions de la Charte dans les législations, les politiques et les pratiques nationales.



La Commission appelle également tous les États membres qui n'ont pas ratifié la Charte à le faire dès que possible.


EXTRAITS:

[......]
  • CHAPITRE VIII 
  • DES SANCTIONS EN CAS DE CHANGEMENT ANTICONSTITUTIONNEL DE GOUVERNEMENT
  •  Article 23
  • Les Etats parties conviennent que l’utilisation, entre autres, des moyens ci-après pour accéder ou se maintenir au pouvoir constitue un changement anticonstitutionnel de gouvernement et est passible de sanctions appropriées de la part de l’Union:
  • 1. Tout putsch ou coup d’Etat contre un gouvernement démocratiquement élu. 
  • 2. Toute intervention de mercenaires pour renverser un gouvernement démocratiquement élu. 
  • 3. Toute intervention de groupes dissidents armés ou de mouvements rebelles pour renverser un gouvernement démocratiquement élu. 
  • 4. Tout refus par un gouvernement en place de remettre le pouvoir au parti ou au candidat vainqueur à l’issue d’élections libres, justes et régulières. 
  • 5. Tout amendement ou toute révision des Constitutions ou des instruments juridiques qui porte atteinte aux principes de l’alternance démocratique. 
  • .....
  • Article 25 
  • 1. Si le Conseil de Paix et de Sécurité constate qu’il y a eu changement anticonstitutionnel de gouvernement dans un Etat partie, et que les initiatives diplomatiques ont échoué, il prend la décision de suspendre les droits de participation de l’Etat partie concerné aux activités de l’Union en vertu des dispositions des articles 30 de l’Acte Constitutif et 7 (g) du Protocole. La suspension prend immédiatement effet. 
  • 2. Cependant, l’Etat partie suspendu est tenu de continuer à honorer ses obligations vis-à-vis de l’Union, en particulier celles relatives au respect des droits de l’homme. 
  • 3. Nonobstant la suspension de l’Etat partie concerné, l’Union maintient ses relations diplomatiques et prend toutes initiatives afin de rétablir la démocratie dans ledit Etat partie. 
  • 4. Les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement ne doivent ni participer aux élections organisées pour la restitution de l’ordre démocratique, ni occuper des postes de responsabilité dans les institutions politiques de leur Etat. 
  • 5. Les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement peuvent être traduits devant la juridiction compétente de l’Union.
  • 6. La Conférence impose des sanctions à l’encontre de tout Etat partie qui fomente ou soutient un changement anticonstitutionnel de gouvernement dans un autre Etat, et ce, en vertu des dispositions de l’article 23 de l’Acte constitutif. 
  • 7. La Conférence peut décider d’appliquer d’autres formes de sanctions à l’encontre des auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement, y compris des sanctions économiques. 
  • 8. Les Etats parties ne doivent ni accueillir ni accorder l’asile aux auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement. 
  • 9. Les États parties jugent les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement ou prennent les mesures qui s’imposent en vue de leur extradition effective. 
  • 10. Les Etats parties encouragent la signature d’accords bilatéraux ainsi que l’adoption d’instruments juridiques sur l’extradition et l’entraide judiciaire. Article 26 Le Conseil de Paix et de Sécurité lève les sanctions dès que la situation qui a motivé la suspension est résolue.
[....]


Voir l'intégralité de la Charte:




ANALYSE:


Depuis les années 2000 les élections et le rejet de changements anticonstitutionnels de gouvernements sont les nouveaux objectifs affichés de l’Union africaine pour renforcer la démocratie sur le continent. Le 15 février 2012, est entrée en vigueur la Charte africaine sur la Démocratie, les Elections et la Gouvernance.

L’affirmation de ces objectifs n’ont pas enrayé le phénomène des coups d’états en Afrique : Mauritanie (2008),  Guinée (2008, 2009), Guinée-Bissau (2009 ; 2012), Madagascar (2009), Niger (2010), Mali, Guinée (2012), Centrafrique (2013).De nombreuses élections sont suivies de violences voire des affrontements ethniques : Kenya, Gabon, Togo, Guinée, RDC etc. Ces coups d’Etat illustrent la difficulté des Etats africains à maîtriser et s’approprier les mécanismes électoraux comme source légitime du pouvoir.
L’une des difficultés tient à la confusion de l’Union africaine sur le concept de démocratie qu’elle affirme promouvoir à travers des élections « libres et transparentes ». A cette confusion s’ajoute le caractère réfractaire des Etats africains longtemps dominés par des dirigeants autocrates à se soumettre de gaieté de cœur à cette forme d’alternance du pouvoir politique. 

I-                  Approche électorale de l’Union africaine 

L’Union africaine (UA) a parmi ses objectifs, la promotion des principes et des institutions démocratiques, la bonne gouvernance et l’état de droit. [1] Bien qu’elle ne donne pas une définition de la démocratie, elle érige les élections en remparts contre les changements anticonstitutionnels.


A-  Les élections comme rempart contre les changements anticonstitutionnels
Depuis 1997, l’Organisation pan africaine condamne les changements anticonstitutionnels de gouvernements[2]Cette condamnation est inscrite dans l’article 4p de l’Acte constitutif de l’Union africaine.
L’Organisation a recensé les éléments qui entrent dans la définition du changement anticonstitutionnel de gouvernement depuis le 36ème sommet de l’Organisation en 2000[3]. Ils figurent dans la Charte africaine de la Démocratie, des Elections et de la bonne Gouvernance adoptée en 2007. L’article 23 intitulé « des sanctions en cas de changement anticonstitutionnel de gouvernement » donne comme liste :
1. Tout putsch ou coup d’Etat contre un gouvernement démocratiquement élu.
2. Toute intervention de mercenaires pour renverser un gouvernement démocratiquement élu
3. Toute intervention de groupes dissidents armés ou de mouvements rebelles pour renverser un gouvernement démocratiquement élu.
4. Tout refus par un gouvernement en place de remettre le pouvoir au parti ou au candidat vainqueur à l’issue d’élections libres, justes et régulières.
5. Tout amendement ou toute révision des Constitutions ou des instruments juridiques qui porte atteinte aux principes de l’alternance démocratique.
Les sanctions encourues par les contrevenants, consistent en la suspension par l’Union, du droit de participation de l’Etat concerné aux activités de l’organisation  (art 23 et 30 de l’Acte constitutif). La Charte africaine de la Démocratie prévoit également la traduction des auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement devant la juridiction compétente de l’Union, le refus d’asile et l’extradition de ces auteurs etc. (art.25). Le Protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine (CPS), adopté à Durban (Afrique du Sud) le 9 juillet 2002 qui est entré en vigueur le 26 décembre 2003 dispose que le Conseil de paix et de sécurité impose des sanctions chaque fois qu’un changement anticonstitutionnel de gouvernement se produit dans un Etat membre[4]. La Centrafrique a ainsi été suspendue de l’UA par une décision du CPS du 25 mars, après le renversement du Président François Bozizé par le chef de la coalition rebelle, Michel Djotodia. L’organe, bien qu’ayant pris acte du départ de Bozizé, tout en exigent la restauration immédiate de l’ordre constitutionnel, a, en outre imposé des restrictions de voyager et le gel des avoir des responsables de Seleka, y compris du nouveau chef de l’Etat.
Les coups d’état intervenus en Mauritanie, à Madagascar, au Niger, au Mali et en Guinée Bissau alors que ces Etats avaient des dirigeants issus d’élections reconnues démocratiques montrent que les mesures prises par l’Union africaine sont insuffisantes pour empêcher les changements anticonstitutionnels de gouvernement. En plus des coups d’Etat, les révoltes populaires qui ont ébranlé la Tunisie, l’Egypte et la Libye constituent un autre mode d’alternance du pouvoir en Afrique et l’Organisation n’y est pas préparée. Elle déclare à leur propos que :
« Les révolutions populaires intervenues en Tunisie et en Egypte étaient inédites et ont posé de sérieux problèmes doctrinaux, car ne correspondant à aucun des cas de figure prévus par la Déclaration de Lomé sur les changements anticonstitutionnels de Gouvernement»[5].
En réalité si l’Union africaine est prompte à condamner les coups d’Etat, elle l’est moins face aux modifications des constitutions et des codes électoraux par des dirigeants qui ont, pour la majorité d’entre eux, accédé au pouvoir par des coups d’Etat et qui cherchent ainsi à s’y pérenniser.[6]
Ainsi en 2009, le Président du Niger, Mamadou Tandja, après s’être accordé les pleins pouvoirs et dissout l’Assemblée nationale, a également dissout la Cour Constitutionnelle qui à trois reprises s’était opposée à son projet de référendum pour modifier la Constitution pour lui permettre de se représenter. Il a ainsi violé le principe d’inamovibilité des magistrats et organisé un référendum qui lui a permis de modifier la Constitution. L’Union africaine qui a peu réagi face à ces agissements, a condamné le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD) qui l’a renversé et a suspendu le Niger. Ce pays ne sera réintégré dans les instances africaines qu’après une transition de treize mois à l’issue de laquelle la junte a organisé des élections législatives et présidentielle.
Une élection mal organisée, a pourtant un impact sur les scrutins qui suivent comme le montre plusieurs pays africains. Les mois prochains, des élections auront lieu à Madagascar. Les prémisses d’une autre crise majeure sont déjà palpables et l’UA doit déjà prendre des mesures et moyens conséquents pour y faire face. Le pays est dirigé depuis 2009 par Andry Rajoelinaarrivé au pouvoir par un putsch, et qui est resté bien au-delà des six mois imposés par l’UA pour un retour à l’ordre constitutionnel.  Une lueur commençait à apparaître après la décision de deux principaux protagonistes du blocage politique, l’actuel Président et son prédécesseur installé en Afrique du Sud, Marc Ravalomanana, de ne pas se présenter à l’élection présidentielle prévue le 24 juillet et le 25 septembre juillet 2013. Mais contre toute attente, et à la date butoir des dépôts des candidatures, Andry Radjoelina a présenté sa candidature qui a été retenue par la Cour électorale spéciale (CES). Il a invoqué la candidature de l’épouse de son challenger,Lalao Ravalomana pour justifier la sienne. Un autre candidat à cette élection est l’ancien Président Didier Ratsiraka, 76 ans qui a dirigé le pays de 1975 à 1993 et de 1997 à 2002 et l’avait quitté après un violent bras de fer électoral avec Marc Ravalomanana. 
B-   Les élections, panacée pour l’instauration de la démocratie
Le rejet d’un gouvernement anticonstitutionnel n’est pas un critère suffisant pour l’instauration de la démocratie. L’Acte constitutif de l’Union africaine ne mentionne pas le mot « élection » mais entend promouvoir les principes et les institutions démocratiques, la participation populaire et la bonne gouvernance. Les élections sont également sous entendues dans d’autres textes de l’Organisation comme la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui stipule dans son préambule que les droits civils et politiques sont indissociables des droits économiques, sociaux et culturels. Cette charte dispose en son article 13 que :
« Tous les citoyens ont le droit de participer librement à la direction des affaires publiques de leurs pays, soit directement soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis … tous les citoyens ont également le droit d’accéder aux fonctions publiques de leurs pays »
L’Union énumère des principes, qui sans être exhaustifs rentrent dans les principes démocratiques. La Charte africaine de la Démocratie, des Elections et de la bonne Gouvernance cite entre autres, la tenue régulière d’élections transparentes, libres et justes afin d’institutionnaliser une autorité et un gouvernement légitimes, la création des conditions nécessaires pour faciliter la participation des citoyens, la liberté de la presse, l’obligation de rendre compte de la gestion des affaires publiques, le renforcement du pluralisme politique etc. Le chapitre VII de la Charte porte sur les « élections démocratiques ». L’Union donne les directives que les Etats doivent suivre pour l’organisation des élections. Celles-ci relèvent de leur responsabilité, mais ils peuvent solliciter l’aide de la Commission de l’Union qui dispose d’un fonds et peut envoyer des observateurs électoraux.
Dans les faits, l’Union africaine est peu présente lors de l’établissement des listes électorales, une phase cruciale où commencent les fraudes dès le recensement avec une volonté délibérée de surestimer ou d’exclure certaines populations en raison d’une suspicion de leur penchant pour certains candidats (Guinée, Togo, RDC). Elle prévoit certes l’envoi d’une mission exploratoire ou d’information, mais celle-ci n’est pas suffisante pour garantir l’absence de fraudes ou la bonne organisation du processus. Pour le scrutin, l’Organisation africaine dépêche des missions d’observation des élections.
Malgré ses ambitions, L’Union africaine ne dispose ni de stratégie, ni de structures adéquates et peu de fonds pour lui permettre de répondre aux demandes d’assistance électorale. En 2002, elle a adopté la Déclaration sur les principes régissant les élections démocratiques en Afriquequi souligne la nécessité de renforcer le rôle de l’Organisation dans l’observation et le suivi des élections et des processus de démocratisation ainsi que des directives pour les missions d’observation et de suivi des élections.  Elle a mis sur pied une unité pour l’Assistance électorale à la Démocratie et les élections (UDAE) au sein du département des Affaires politiques de la Commission qui a pour objectif de mettre en œuvre le programme l’Union africaine pour la promotion de la démocratie et des élections démocratiques et de faciliter le renforcement des capacités des organismes de gestion des élections à travers des formations, échanges de ressources humaines, de traiter les demandes d’assistance électorale etc. Cette unité qui est déjà opérationnelle est sous équipée tant en ressources humaines qu’en moyens matériels et financiers.
L’Union africaine est en réalité tributaire d’autres organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies, l’Union européenne et de l’Organisation internationale de la Francophonie qui lui apportent une assistance en matière électorale : formation, fonds, fourniture de matériel électoral etc. Il existe un plan d’action pour la mise en œuvre d’un partenariat stratégique Afrique -UE.
L’absence de doctrine électorale est un handicap pour l’Union africaine qui l’empêche de prendre des décisions cohérentes dans les processus électoraux. Cela a été le cas à la suite de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle ivoirienne de novembre 2010 où  les deux candidats du second tour ont tous été proclamés vainqueurs, chacun par une des institutions de l’Etat. Alassane Ouattara a été déclaré gagnant par la Commission électorale indépendante (CEI) tandis que la Cour constitutionnelle a proclamé la victoire de Laurent Gbagbo.
La Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOEUE), qui après l’ONU avait le plus grand nombre d’observateurs électoraux (120), avait, quant à elle regretté que ses observateurs n’aient pas eu accès aux procès-verbaux des bureaux de vote, malgré ses demandes répétées. Elle a considéré que la décision du Conseil constitutionnel prise sur la requête du candidat Laurent Gbagbo est une infraction à la loi ivoirienne qui ne lui permet pas d’annuler partiellement une élection ou de modifier les résultats. Pour la Mission cette décision du Conseil constitutionnel est :
 «  disproportionnée et représente une violation du droit du suffrage puisqu’elle annule 664 405 votes, soit 16% des voix des électeurs ivoiriens pour proclamer la victoire de l’ex candidat Laurent Gbagbo »[7].
Ce n’est pas la première fois que deux candidats sont déclarés vainqueurs d’une même élection présidentielle. Le scénario avait déjà été observé à l’élection présidentielle malgache  en décembre 2001 et encore en Côte d’Ivoire en 2002.
L’Union africaine, bien qu’ayant reconnu la victoire d’Alassane Ouattara, était dans une situation confuse en raison du tiraillement de ses membres. Ainsi :
« Le président ougandais, Yoweri Museveni, avait par exemple qualifié de « simpliste » la position des Nations unies qui ont reconnu la victoire d'Alassane Ouattara : « Il faut ouvrir des enquêtes…. Il ne faut pas se contenter de dire que untel ou untel a gagné. » Le président Sud-Africain Jacob Zuma avait quant à lui estimé que les résultats du second tour de l’élection présidentielle présentaient des « contradictions »[8].
La Mission d’observation électorale de l’Union africaine en Côte d’Ivoire avait notamment regretté des actes de violence (morts, séquestration, intimidation, dégradation de matériel électoral ...) et avait considéré que cela devrait faire l’objet d’une appréciation minutieuse de la part des organes compétents afin de déterminer leur impact sur le scrutin.
De même, la MOE de l’UA qui a supervisé l’élection présidentielle couplée des législatives le 28 novembre 2011 en RDC, en déployant ses observateurs dans la capitale Kinshasa, tout en notant les insuffisances et des difficultés techniques qui ont entraîné des incidents violents, a exhorté les candidats à se soumettre au verdict des urnes et à recourir aux voies légales pour toute contestation.  La timidité de l’appréciation de l’UA contraste encore une fois encore, avec le rapport des observateurs de l’Union européenne qui ont estimé que ni la présidentielle, ni les législatives de 2011, n’ont été crédibles. Malgré la modification constitutionnelle faite à  l’initiative du Président Joseph Kabila le 15 janvier 2011, en remplaçant un scrutin majoritaire à deux tours par une élection majoritaire à un seul tour provoquant un rejet de l’opposition, l’Union africaine, s’est très peu prononcée sur la situation en RDC. Avant le scrutin, le Conseil des Sages a juste dépêché une mission d’information, début octobre et début novembre pour aider aux préparatifs des élections pour consolider la démocratie.

L’Union africaine n’a pas une réelle stratégie quant à l’attitude adéquate à adopter. La généralisation des accords post électoraux visant à demander aux principaux candidats la formation de gouvernement d’union nationale ou encore le fait de conditionner la levée des sanctions contre des gouvernements issus de changements anticonstitutionnels à l’organisation par eux des élections montrent ses lacunes.

L’UA tente, certes de tirer des leçons, mais elle a du mal à définir la meilleure attitude à adopter. Ainsi, après les violences post-électorales au Kenya de 2007-2008 qui ont fait plus de 1000 mort et 350 000 déplacés, la 10ème session ordinaire de la Conférence de l’Union du 31 janvier au 2 février 2008, a décidé d’engager une réflexion collective sur les défis liés aux tensions et aux disputes qui caractérisent souvent les processus électoraux en Afrique, notamment le renforcement des capacités africaines aux niveaux national, régional et continental en matière d’observation et de suivi des élections. Le Conseil des Sages a été chargé de mener cette réflexion.
Pour la présidentielle de mars 2013, l’Union africaine qui d’habitude déploie une vingtaine d’observateurs, y a dépêché 65 observateurs conduits par l’ancien président du Mozambique,Joaquim Chissano, secondé par la Madame Aïsha Abdullahi, la Commissaire de l’UA pour les affaires politiques.
Si son action au Kénya est salutaire, son observation des élections gambiennes pose des questions par rapports aux principes régissant les élections où suivant le point 3.12, elle se réserve le droit de ne pas envoyer des observateurs ou de les retirer au cas où les conditions dans le pays ne répondent pas aux principes directeurs de l’Union africaine pour l’organisation d’élections libres et transparentes. En effet, l’UA a envoyé des observateurs pour superviser l’élection présidentielle du 24 novembre 2011 et des législatives du 29 mars 2012 où le Président Yaya Jammeh, invoquant l’illettrisme de la population, a imposé le vote avec des billes en guise de bulletins, dans des bidons de différentes couleurs (urnes). La CEDEAO avait refusé d’y envoyer des observateurs estimant que les conditions d'une élection libre, juste et transparente n'étaient pas réunies.

II- Elections prérogatives de la souveraineté étatique
L’Union africaine trouve la limite de sa volonté de promouvoir la démocratie et l’alternance politique dans les principes de souveraineté nationale et de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats énoncés dans son Acte constitutif.



A- Primauté des principes de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires internes
La Charte africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance  parle de promouvoir et renforcer l’adhésion au principe de l’Etat de droit fondé sur le respect et la suprématie de la Constitution et de l’ordre constitutionnel des Etats parties.
Pourtant, certains gouvernements n’hésitent pas à modifier les constitutions en leur faveur sans que cela ne suscite une réaction de l’Union. Parfois les lois électorales sont violées. Certaines manœuvres consistent à susciter les acteurs politiques même si ceux-ci n’ont aucune base électorale. Par exemple, en Guinée, en 2009, le capitaine Moussa Dadis Camara avait favorisé la création d’une centaine de partis politique s’ajoutant à la quarantaine qui existait depuis les années 1990. La plupart des candidats de ces partis n’ont pas pu atteindre 1% de suffrages exprimés au premier tour de l’élection présidentielle. Au Togo en 1993 comme en Guinée en 2003, ou encore au Tchad en 2011, devant la décision de boycott de l’opposition, le pouvoir n’a pas hésité à faire créer des partis politiques avec des leaders politiques sans envergure pour l’affronter aux élections qu’il a largement remportées.
En plus des considérations de souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures, le nombre d’observateurs que l’Union déploie sur le terrain ne lui permet pas de s’assurer de la fiabilité de tout le processus électoral auquel elle apporte son quitus.
Un autre élément qui explique la difficulté de l’Union africaine à promouvoir la démocratie tient à son instance suprême de décision, la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement. Un grand nombre de Chefs d’Etat et de gouvernement sont arrivés au pouvoir par la force. Ce sont eux qui sont amenés à condamner les nouveaux dirigeants qui emprunteraient les mêmes moyens qu’eux. Cette incohérence produit d’autres incohérences quand la Conférence désigne un de siens pour mener la médiation dans un Etat en crise. Ainsi des chefs d’Etat arrivés  au pouvoir à travers des coups d’état militaire se trouvent investis par leurs pairs pour favoriser un bon processus démocratique dans d’autres pays.
L’intérêt de l’Union pour l’organisation des élections est en réalité une prise en compte des nouvelles réalités sociales apparues dans les années 1990 avec la fin de la guerre froide.
B- Expression de la volonté des populations
L’organisation des élections libres est d’abord l’exigence des populations africaines avant leurs appropriations par les institutions. La crise économique, la détérioration de leurs conditions de vie et la chute du mur de Berlin ont favorisé les contestations sociales dans de nombreux Etats africains. Des conférences nationales sont organisées pour réclamer des régimes démocratiques. C’est la fin des régimes à partis uniques. Les gouvernements autoritaires s’ouvrent au pluralisme politique d’où la réapparition de partis politiques d’opposition interdits depuis la fin des années 1960, l’émergence d’une presse indépendante du pouvoir politique. Les libertés publiques commencent à devenir une réalité.
Les élections pluralistes remplacent les plébiscites organisés par les régimes en place. Les premières alternances politiques non issues de coups d’état militaire commencent à éclore :Bénin, Cap-Vert, GhanaMali etc. Cependant ce mode d’alternance démocratique ne s’impose pas partout. L’alternance politique s’obtient ailleurs au prix de guerres civiles (Somalie, Libéria, Sierra Léone, Guinée-Bissau,  République Démocratique du Congo, Congo, Rwanda, Burundi etc.). Dans ces clashes, le désir de certains clans d’accéder au pouvoir se heurte à une résistance des autorités établies. Dans d’autres Etats, les aspirants au pouvoir sont confrontés aux manipulations. Par des combines utilisant les moyens de l’Etat et en pervertissant le système normatif, les autorités en place excluent leurs adversaires des compétitions électorales. De telles manœuvres favorisent même la dévolution dynastique du pouvoir (RDC, Togo, Gabon). La manipulation n’est pas du ressort exclusif des autorités en place. Elle est aussi parfois utilisée par l’opposition. La classe politique dans son ensemble (pouvoir et opposition), attise les frustrations identitaires qui conduisent dans certains cas à des affrontements communautaires.
Le concept de démocratie est brandi comme un leitmotiv dans un pur esprit de mimétisme de ce qui se passe ailleurs et non comme une réelle volonté de favoriser la démocratie et les institutions démocratiques. Les résultats contradictoires d’une même élection émanant de deux institutions du même Etat illustre une absence de culture démocratique. Une étude attentive des institutions peut montrer que les résultats sont plus conditionnés à la composition des institutions et à leurs liens ou allégeances avec les acteurs politiques qu’ils ne reflètent le réel verdict des urnes. Ce constat explique l’exigence des oppositions africaines pour que les élections ne soient pas organisées par le gouvernement, mais par des autorités administratives indépendantes qui ces dernières années ont pris le nom de commissions électorales nationales indépendantes.
Une des institutions incontournable est la Cour suprême ou la Cour constitutionnelle, l’organe suprême dans le processus électoral. Il est d’un grand intérêt de connaître le mode de nomination de ses membres. Dans la crise malgache en 2002, la Haute Cour Constitutionnelle avait dans un premier temps proclamé la victoire de D. Ratsiraka, avant, après sa recomposition, d’annoncer que M. Ravalomanana était le vainqueur de l’élection présidentielle de décembre 2001. Une telle incohérence émanant des organes étatiques la décrédibilise. Où et comment faire un recours dans de tels cas  en l’absence de confiance des acteurs politiques aux institutions nationales ? La Cour de Justice de l’Union africaine peut-elle connaître des contentieux électoraux africains ? Aura-t-elle plus de crédibilité que les institutions nationales ?
L’Union africaine doit élaborer un guide qui devra entre autres mettre l’accent sur la déontologie et l’éthique auxquelles doivent se conformer les institutions intervenant dans les processus électoraux.
La démocratie est loin d’être ancrée dans les mœurs en Afrique. Constitue-t-elle pour autant un mythe pour le continent. Non, le processus démocratique fait progressivement son entrée dans le paysage politique africain avec l’essor de la société civile, l’émergence du pluralisme politique. De nombreux Etats commencent également à se familiariser avec la tenue d’élections qui ne sont pas toujours contestées et qui y ont favorisé l’alternance à de nombreuses  reprises, ce qui n’est pas le cas de la majorité (Ghana, Cap-Vert). Beaucoup sont encore confrontés au difficile enracinement d’une culture démocratique. Pourtant la forte mobilisation des populations, qui n’hésitent pas à parcourir des distances importantes, et attendant en rangs pendant des heures d’accomplir, cet acte citoyen, est le gage de l’intérêt, qu’elles portent au choix démocratique de leurs dirigeants.
Hassatou Baldé




[1] L’article 3  g de l’acte constitutif de l’Union africaine sur ses objectifs parle de « promouvoir les principes et les institutions démocratiques, la participation populaire, l’article 3m ajoute le respect des principes démocratiques, les droits de l’homme, l’état de droit et de la bonne gouvernance et l’article 3 p condamne et rejette les changements anticonstitutionnels de gouvernement. L’Union africaine après avoir réaffirmé ses préoccupations démocratiques depuis ses sommets d’Alger en 1999.
[2] Cette condamnation a notamment été réaffirmée aux 35ème  et 36ème sommets d’Alger en 1999 et de Lomé en 2000.
[3] AHG/Decl.5 (XXXVI) Déclaration pour une réaction de l’OUA face aux changements anticonstitutionnels de gouvernement
[4] Art 7g du Protocole
[5] Session extraordinaire de la Conférence de l’Union sur l’état de paix et de sécurité en Afrique, Addis-Abeba 25 -25 mai 2011

[6] Burkina Faso janvier 1997,  Sénégal (1998, bien que ce pays soit l’un des rares à ne pas connaître les coups d’Etats, en 2011, une tentative de révision de la Constitution par le Président Wade vise à le faire élire en même temps que son vice-président qui serait amené à la succéder. Elle est perçue par l’opinion sénégalaise comme ayant pour objectif de favoriser la dévolution dynastique du pouvoir à son fils Karim Wade et n’aboutit pas en raison de fortes mobilisations ; Madagascar, mars 1998, dans le cas malgache le Président Didier Ratsiraka avait modifié l’article 45 qui limitait le nombre de mandat à deux, en permettant au chef de l’Etat un mandat supplémentaire, Namibie en décembre 1998, Guinée en novembre 2001, Tunisie en mai 2002,  Togo, en décembre 2002, Gabon juillet 2003,  Tchad et Ouganda en 2005, Cameroun en 2008
[7] Rapport final sur les élections présidentielles en Côte d’Ivoire : http://eeas.europa.eu/delegations/guinea/documents/press_corner/news/20110125_fr.pdf



Le GTT INTERNATIONAL, collectif de la diaspora malagasy, dont le siège est à Genève (CH), poursuit un double objectif: la restauration de l'Etat de droit et le rétablissement de la Démocratie à Madagascar. Il prône et oeuvre pour la liberté d'expression, la prise de conscience citoyenne et la mise en place d'une vraie démocratie dont l'exigence première est la tenue d'un processus électoral inclusif, libre et transparent ".