jeudi 16 septembre 2010

Conférence nationale: Lettre de M Joachim Chissano en réponse au gouvernement putschiste

Excellence,


1. J’ai l’honneur d’accuser réception de votre lettre en date du 07 septembre 2010, m’invitant à assister à la Conférence nationale, organisée par la Coordination nationale des organisations de la Société Civile (CNOSC) et les Sages (Raiamandreny mijoro), dans le cadre du dialogue Malgacho-malgache, qui se tiendra à Antananarivo du 13 au 17 septembre 2010.

2. L’idée d’un dialogue Malgacho-malgache a été officiellement portée à mon attention par SEM Andry Rajoelina, Président de la Haute Autorité de la Transition (HAT) à Madagascar, par une lettre qui m’a été adressée le 31 mai 2010. Aux termes de cette lettre, SEM le Président de la HAT m’a informé d’une nouvelle initiative des Grands Notables qui souhaitent organiser un dialogue national à Madagascar, auquel toutes les forces vives de la Nation s’engageront dans la résolution de la crise. A cet effet, les Grands Notables ont mis en place un Comité des Sages , secondé d’une part, par un Comité organisateur (constitué par la Société civile) et par un Comité constitutionnel consultatif (composé par des experts juridiques) d’autre part . Le Président de la HAT m’a demandé d’appuyer cette initiative.

3. J’ai entrepris plusieurs consultations, à l’intérieur et à l’extérieur de Madagascar, avec les principales parties prenantes malgaches et la communauté internationale sur le dialogue Malgacho-malgache. Sur la base de ces consultations, la médiation de la SADC a décidé de prêter son appui à cette initiative. A ce titre, j’ai soumis des rapports au Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine et au Sommet de l’Organe de Coopération en matière de politique, de défense et de sécurité de la SADC, par lequel j’ai demandé à la SADC, à l’Union Africaine et à la communauté internationale dans son ensemble de fournir un soutien politique, technique, financier et logistique au processus de dialogue Malgacho-malgache. Ce soutien était conditionné au fait que ledit processus soit crédible, transparent, neutre, consensuel et inclusif. Cette proposition a été positivement reçue par la Communauté Internationale.

4. Au moment où le comité d’organisation a commencé ses travaux, les questions de crédibilité, de transparence, de neutralité, de consensualisme et d’inclusivité furent soulevées à mesure que deux groupes de Société civile, notamment la Coalition des Organisations de la Société Civile (COSC) ainsi que l’Alliance des Organisations de la Société Civile (AOSC) se faisaient concurrence pour l’organisation du dialogue Malgacho-malgache. De plus, d’autres Organisations de la Société Civile comme le KMF/CNOE ou encore la CSR-AN, ont également exprimé leur souhait de jouer un rôle dans la tenue de ce genre de dialogue.

5. La médiation de la SADC, dans le cadre de ses consultations avec les principales parties prenantes malgaches, a fait clairement savoir qu’afin que le processus soit crédible et transparent, il est nécessaire d’assurer que la neutralité, la consensualité et l’inclusivité soient garanties aussi bien au niveau des participants qu’au niveau de la structure organisante du processus. A cet égard, la médiation de la SADC a convaincu les différents groupes de la Société civile de venir s’assembler autour d’une nouvelle structure unifiée, au sein de laquelle toutes les sensibilités politiques seraient représentées pour conduire le

processus du dialogue Malgacho-malgache. Ainsi, c’était dans ce contexte que la Coordination nationale des organisations de la Société Civile (CNOSC) a été formé par la COSC et l’AOSC avec le KMF/CNOE afin de ramener les différentes sensibilités politiques dans la société civile.

6. La CNOSC a effectué un travail louable dans ses efforts d’organiser un dialogue Malgahco-malgache. En assurant la médiation nationale, la CNOSC a tenu les premières consultations avec tous les acteurs politiques malgaches pour discuter d’un accord politique à adopter lors de la Conférence nationale. Ces consultations, qui ont été suspendues le 27 août 2010, a fait du travail considérable et obtenu des résultats substantiels en ce qui concerne , entre autres, la structure de l’exécutif de la Transition (Présidence de la Transition et gouvernement d’unité nationale conduit par un Premier Ministre de consensus), la structure législative (Conseil supérieur de la Transition et Congres de la transition) , ainsi que celle d’autres institutions de la Transition (Conseil national de la réconciliation , Conseil Economique et Social et Commission Electorale Nationale Indépendante). Toutefois, celle des autres institutions de la Transition telles que la Haute Court Constitutionnelle et l’Organe de défense et de sécurité nécessitaient des débats supplémentaires.

7. Nous avons conscience que malgré cette performance louable, la CNOSC a rencontré de sérieux problèmes d’ordre organisationnel et méthodologique lesquels avaient besoin d’être solutionnés. La suspension des consultations était dûe en partie pour permettre à la CNOSC d’étudier ces problèmes. Nous sommes aussi conscients que la CNOSC, après avoir suivi des formations appropriées et reçu une assistance technique, est en train de se préparer à entamer la deuxième phase de ces efforts de médiation pour conclure un accord politique qui sera adopté lors de la conférence nationale, de manière beaucoup plus professionnelle et plus efficace. La CNOSC espère que ces nouvelles consultations prendront également en ligne de compte une meilleure représentation des forces politiques malgaches. Parallèlement à cet exercice, la CNOSC est aussi en train d’entreprendre des travaux préparatoires en vue de la conférence nationale en consultation avec les Raiamandreny Mijoro.

8. Plus tard une controverse a été soulevée au sujet de la convocation de la conférence nationale. La CNOSC, qui est supposée avoir la responsabilité de l’organisation de la conférence, est convaincue que l’organisation de la conférence nationale devrait être mieux préparée et non précipitée. La CNOSC est également convaincue qu’avant la conférence nationale, il est nécessaire d’apaiser le pays et d’achever des travaux préparatoires clés, dont l’accord politique sur la gestion de la transition. La position de la CNOSC semble recevoir le soutien d’une partie des forces politiques malgaches.

9. Néanmoins, d’autres parties prenantes politiques malgaches sont favorables à la tenue de la conférence nationale du 13 au 17 septembre 2010, avec ou sans la conclusion des travaux préparatoires politiques nécessaires. Cette position semble avoir le soutien du Gouvernement et de la HAT qui semblent faire pression pour la tenue de la conférence comme prévue. Le Gouvernement serait prêt à financer la conférence nationale. Si cela est vrai, la neutralité, l’impartialité et la transparence du processus seront remises en question car le gouvernement serait accusé de s’ingérer et de manipuler le processus ce qui va tendre vers l’unilatéralisme. Organiser une conférence nationale à laquelle ne participeront pas à la fois ni la CNOSC, ni une partie de la famille politique malgache ainsi que la société civile, remettra aussi en question l’inclusivité du processus et le consensualisme

des décisions qui seront prises dans ce cadre. Tout ceci compromettra finalement la crédibilité du processus.

10. La Médiation de la SADC continue à être favorable à un dialogue Malgacho-Malgache qui est crédible, neutre, transparent, consensuel et inclusif. Etant donné que la tenue de la conférence nationale du 13 au 17 septembre 2010 n’obtient pas le consensus de toutes les parties prenantes clé malgaches, y compris la CNOSC, car considéré une fois de plus comme un autre évènement unilatéral, la Médiation de la SADC ne pourra pas être associée à des processus unilatéraux qui excluent les parties prenantes clé malgaches. La Médiation de la SADC pense que des efforts devront être effectués pour mieux préparer la conférence nationale pour un dialogue malgacho-malgache réussi. En particulier, la Médiation de la SADC considère qu’il est essentiel de conclure au préalable un accord politique sur la gestion de la transition avant la conférence nationale. Cette mesure sera décisive pour assurer une conférence nationale réussie et aussi donner une légitimité et une reconnaissance internationale à la transition.

11. Veuillez accepter, Votre Excellence, l’assurance de ma considération distinguée

1 commentaire:


Le GTT INTERNATIONAL, collectif de la diaspora malagasy, dont le siège est à Genève (CH), poursuit un double objectif: la restauration de l'Etat de droit et le rétablissement de la Démocratie à Madagascar. Il prône et oeuvre pour la liberté d'expression, la prise de conscience citoyenne et la mise en place d'une vraie démocratie dont l'exigence première est la tenue d'un processus électoral inclusif, libre et transparent ".