par Alpha
Twist, le 25 Avril 2013
IL existe maintenant deux classes de citoyens à Madagascar: la première,
les citoyens avec leurs droits et la deuxième, ceux dont les droits sont
restreints. Le «Rapport du Président de la Commission sur la
situation à Madagascar » du 22 Avril 2013 ( http://allafrica.com/stories/201304231183.html?viewall=1 )
affirme que Mme Lalao Ravalomanana, qui n'a jamais été accusée ou reconnue
coupable d'aucun crime, doit s'abstenir « de toute déclaration politique ou de
participer à toute manifestation politique». Cela va à
l'encontre de ses droits en vertu de la Déclaration universelle des droits de
l'homme, ce qui lui fait une citoyenne de seconde classe dans son propre pays.
Mme
Ravalomanana a été contrainte d'accepter des restrictions de ses droits à la
liberté d'expression et de réunion pour être autorisée à retourner dans son
pays natal pour voir sa mère souffrante.
Pour Mme
Ravalomanana, le choix était clair: soit accepter les conditions imposées par
la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) et Andry Rajoelina ou bien
le risque ne plus jamais revoir sa mère vivante.
L'accord qui
a imposé des restrictions sur les droits de Mme Ravalomanana est intitulé «Accord sur la visite de l'ex-première dame
Mme Lalao Ravalomanana à Madagascar ». Il est passé entre
le Président Jakaya Kikwete de Tanzanie, représentant de la SADC, Andry
Rajoelina, Marc Ravalomanana, et Lalao Ravalomanana. L'accord précise que « A Madagascar, elle [Mme
Ravalomanana] sera libre de rencontrer et communiquer avec qui elle veut, mais elle
doit s'abstenir de faire des déclarations politiques et organiser des
rassemblements politiques. » En outre, l’accord précise que
la «durée de séjour de l'ex-première dame à Madagascar sera fonction des
circonstances et conditions suivantes:
- L'état
de santé de la mère de l'ancienne première dame, comme mentionné au point 5, et
certifié par des experts médicaux dans l'établissement où elle est assistée.
- La
conformité aux conditions de l'accord ».
En d'autres
termes, si Mme Ravalomanana fait des déclarations politiques, la SADC approuverait
son arrestation et son expulsion de son propre pays.
En imposant
ces conditions, la SADC et Rajoelina violent les droits de Mme Ravalomanana au
regard de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Article 2:
«Chacun peut se prévaloir de tous les droits et libertés énoncés dans la
présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur,
de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre, l'origine
nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou toute autre situation. »
Article 13: « Tout
le monde a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans
son pays »
Article 19: «
Tout le monde a le droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce droit
implique la liberté d'avoir des opinions sans interférence et de rechercher, de
recevoir et de répandre des informations et des idées par quelque moyen
d'expression que ce soit. »
En mettant sous
conditions le retour à Madagascar de Mme Ravalomanana, l'accord constitue
également une violation directe de la Feuille de Route de la SADC qui stipule
dans son article 20: «Les Hautes Autorités de transition (HTA)
doivent permettre à tous les citoyens malgaches en exil pour des raisons
politiques à retourner inconditionnellement dans le pays, y compris M. Marc
Ravalomanana ».
Le 12 Mars
2013, Mme Ravalomanana est retournée à Madagascar d'un exil forcé en Afrique du
Sud. Depuis, elle s'est abstenue de faire des déclarations
politiques. Cependant, la
Mouvance Ravalomanana a annoncé le 15 Avril 2013 que Mme Lalao Ravalomanana était
le candidat de la Mouvance pour les Présidentielles de Madagascar prévues en Juillet 2013.
Le 22 Avril,
le journal L’Express de Madagascar a
consacré une page aux activités de la campagne du candidat du parti TGV de
Rajoelina à la présidence de Madagascar. Un article était intitulé « Edgard
Razafindravahy conquiert le Sud», un autre : «Visite éclair mais étincelant
du candidat TGV ». La page a réservé 6 photos de M. Razafindravahy en
pleine campagne. En revanche, Mme Ravalomanana est muselée.
La situation
est fondamentalement injuste: le candidat de Rajoelina est libre de faire sa campagne,
mais Mme Ravalomanana ne l’est pas.
Si elle fait
la moindre déclaration politique, elle pourrait être arrêtée et expulsée avec
l'approbation de la SADC. L’éventualité de son arrestation est déjà en cours de
discussion dans les médias malgaches.
La menace d'une arrestation et d'expulsion sont réelles. Quand elle est retournée
dans son pays en Juillet 2012, Mme
Ravalomanana a été rapidement arrêtée et expulsée manu militari de son propre
pays.
Voici comment le département d'Etat américain a décrit l'incident dans son
rapport sur les droits
de l'homme pour 2012 (http://www.state.gov/j/drl/rls/hrrpt/2012/af/204137.htm ):
Le 27
Juillet, Mme Ravalomanana a tenté de revenir avec sa belle-fille Guergena. L'avion
a atterri sans incident, mais les autorités ont appréhendé les deux femmes à
l'aéroport d'Antananarivo. Le personnel de sécurité les a physiquement obligés
d’embarquer sur le vol suivant, Guergena aurait été violentée au cours de cette
opération.
Après cette expulsion
forcée, l'ambassade américaine à
Antananarivo a répondu, le 31 Juillet 2012, par un communiqué sur sa page
Facebook, traduit du malgache comme suit :
Communiqué à
propos de la tentative de retour de Mme Lalao Ravalomanana à Madagascar
Nous continuons à soutenir tous les
efforts de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) à la
recherche d'une solution à la crise à Madagascar. Nous tenons
à souligner qu'il est indiqué dans la feuille de route de la SADC que
"tous les citoyens malgaches en exil pour des raisons politiques peuvent
rentrer au pays sans condition". Les dirigeants
politiques ici, dans le pays, doivent faire ce qui est nécessaire pour parvenir
à des élections libres et justes qui seront acceptées par la communauté
internationale afin de revenir à la gouvernance démocratique ici à Madagascar. Nous
encourageons tous les impliqués à respecter leurs responsabilités conformément
au droit international en particulier en conformité avec les droits humains et
la primauté du droit.
La SADC, en revanche, a soutenu l'expulsion de Mme Ravalomanana en affirmant dans
un communiqué qu'elle était "consternée
par la tentative subreptice entreprise par Mme Ravalomanana de rentrer à
Madagascar en violation des engagements en cours" ( http://www.news24.com/
Africa/News/SADC-chides-Ravalomananas-wife-20120731 ).
L'ONU est restée
silencieuse.
Le «Rapport du Président de la Commission sur la
situation à Madagascar» a déjà déclaré que «Mme Lalao Ravalomanana ne remplit manifestement
pas les conditions nécessaires " pour être candidat à la
présidence de Madagascar. Ceci est basé sur la condition imposant six mois de
présence physique à Madagascar pour être éligible.
Seulement, le rapport ne mentionne pas que son absence
est liée à sa violente expulsion par Rajoelina en juillet 2012 mais également, parce que la SADC n'a pas favorisé l’application
de l'article 20 de la feuille de route.
La SADC a
conspiré avec Rajoelina pour priver une partie de ses droits humains à l'un des
principaux adversaires politiques de ce dernier, de façon à augmenter les
chances de succès de son propre candidat.
L'Union africaine, dans le communiqué de la récente réunion du Conseil de paix et de sécurité
a noté le «Rapport du Président de la Commission sur la situation à
Madagascar". Mais l'UA n'a pas commenté les restrictions imposées sur
les droits de Mme Ravalomanana, donc elle les ont toléré.
L'Organisation des Nations Unies et le reste de la
communauté internationale à
Madagascar sont pleinement conscients des restrictions de ses droits imposées à
Mme Ravalomanana. Pourtant, ils n'ont rien dit, ce qui les rend complices
de la SADC pour déni de droits.
Sous le
régime de l'apartheid en Afrique du Sud, avec une classe de citoyens qui n'ont
pas les libertés fondamentales, les élections n'ont jamais été libres et
équitables. Les élections à Madagascar ne seront libres et
justes tant que Mme Ravalomanana reste privée de son droit de participer à la
vie politique de son pays.
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