samedi 27 avril 2013

Apartheid à Madagascar

Traduction libre:


par Alpha Twist, le 25 Avril 2013

IL existe maintenant deux classes de citoyens à Madagascar: la première, les citoyens avec leurs droits et la deuxième, ceux dont les droits sont restreints.   Le «Rapport du Président de la Commission sur la situation à Madagascar » du 22 Avril 2013 ( http://allafrica.com/stories/201304231183.html?viewall=1 ) affirme que Mme Lalao Ravalomanana, qui n'a jamais été accusée ou reconnue coupable d'aucun crime, doit s'abstenir « de toute déclaration politique ou de participer à toute manifestation politique».   Cela va à l'encontre de ses droits en vertu de la Déclaration universelle des droits de l'homme, ce qui lui fait une citoyenne de seconde classe dans son propre pays.

Mme Ravalomanana a été contrainte d'accepter des restrictions de ses droits à la liberté d'expression et de réunion pour être autorisée à retourner dans son pays natal pour voir sa mère souffrante.
Pour Mme Ravalomanana, le choix était clair: soit accepter les conditions imposées par la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) et Andry Rajoelina ou bien le risque ne plus jamais revoir sa mère vivante.

L'accord qui a imposé des restrictions sur les droits de Mme Ravalomanana est intitulé «Accord sur la visite de l'ex-première dame Mme Lalao Ravalomanana à Madagascar ».  Il est passé entre le Président Jakaya Kikwete de Tanzanie, représentant de la SADC, Andry Rajoelina, Marc Ravalomanana, et Lalao Ravalomanana. L'accord précise que « A Madagascar, elle [Mme Ravalomanana] sera libre de rencontrer et communiquer avec qui elle veut, mais elle doit s'abstenir de faire des déclarations politiques et organiser des rassemblements politiques. »  En outre, l’accord précise que la «durée de séjour de l'ex-première dame à Madagascar sera fonction des circonstances et conditions suivantes:
-          L'état de santé de la mère de l'ancienne première dame, comme mentionné au point 5, et certifié par des experts médicaux dans l'établissement où elle est assistée.
-          La conformité aux conditions de l'accord ».

En d'autres termes, si Mme Ravalomanana fait des déclarations politiques, la SADC approuverait son arrestation et son expulsion de son propre pays.

En imposant ces conditions, la SADC et Rajoelina violent les droits de Mme Ravalomanana au regard de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Article 2: «Chacun peut se prévaloir de tous les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre, l'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou toute autre situation. » 
Article 13: « Tout le monde a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays »
Article 19: «  Tout le monde a le droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce droit implique la liberté d'avoir des opinions sans interférence et de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées par quelque moyen d'expression que ce soit. »

En mettant sous conditions le retour à Madagascar de Mme Ravalomanana, l'accord constitue également une violation directe de la Feuille de Route de la SADC qui stipule dans son article 20: «Les Hautes Autorités de transition (HTA) doivent permettre à tous les citoyens malgaches en exil pour des raisons politiques à retourner inconditionnellement dans le pays, y compris M. Marc Ravalomanana ».

Le 12 Mars 2013, Mme Ravalomanana est retournée à Madagascar d'un exil forcé en Afrique du Sud.  Depuis, elle s'est abstenue de faire des déclarations politiques.  Cependant,  la Mouvance Ravalomanana a annoncé le 15 Avril 2013 que Mme Lalao Ravalomanana était le candidat de la Mouvance pour les Présidentielles de Madagascar  prévues en Juillet 2013.

Le 22 Avril, le journal L’Express de Madagascar a consacré une page aux activités de la campagne du candidat du parti TGV de Rajoelina à la présidence de Madagascar. Un article était intitulé « Edgard Razafindravahy conquiert le Sud», un autre : «Visite éclair mais étincelant du candidat TGV ». La page a réservé 6 photos de M. Razafindravahy en pleine campagne. En revanche, Mme Ravalomanana est muselée.

La situation est fondamentalement injuste: le candidat de Rajoelina est libre de faire sa campagne, mais Mme Ravalomanana ne l’est pas.

Si elle fait la moindre déclaration politique, elle pourrait être arrêtée et expulsée avec l'approbation de la SADC. L’éventualité de son arrestation est déjà en cours de discussion dans les médias malgaches.

La menace d'une arrestation et d'expulsion sont réelles. Quand elle est retournée dans son pays en Juillet 2012,  Mme Ravalomanana a été rapidement arrêtée et expulsée manu militari de son propre pays. 

Voici comment le département d'Etat américain a décrit l'incident dans son rapport sur ​​les droits de l'homme pour 2012 (http://www.state.gov/j/drl/rls/hrrpt/2012/af/204137.htm ):

Le 27 Juillet, Mme Ravalomanana a tenté de revenir avec sa belle-fille Guergena. L'avion a atterri sans incident, mais les autorités ont appréhendé les deux femmes à l'aéroport d'Antananarivo. Le personnel de sécurité les a physiquement obligés d’embarquer sur le vol suivant, Guergena aurait été violentée au cours de cette opération.

Après cette expulsion forcée, l'ambassade américaine à Antananarivo a répondu, le 31 Juillet 2012, par un communiqué sur sa page Facebook, traduit du malgache comme suit :

Communiqué à propos de la tentative de retour de Mme Lalao Ravalomanana à Madagascar

Nous continuons à soutenir tous les efforts de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) à la recherche d'une solution à la crise à Madagascar.   Nous tenons à souligner qu'il est indiqué dans la feuille de route de la SADC que "tous les citoyens malgaches en exil pour des raisons politiques peuvent rentrer au pays sans condition".   Les dirigeants politiques ici, dans le pays, doivent faire ce qui est nécessaire pour parvenir à des élections libres et justes qui seront acceptées par la communauté internationale afin de revenir à la gouvernance démocratique ici à Madagascar.   Nous encourageons tous les impliqués à respecter leurs responsabilités conformément au droit international en particulier en conformité avec les droits humains et la primauté du droit.

La SADC, en revanche, a soutenu l'expulsion de Mme Ravalomanana en affirmant dans un communiqué qu'elle était "consternée par la tentative subreptice entreprise par Mme Ravalomanana de rentrer à Madagascar en violation des engagements en cours" ( http://www.news24.com/ Africa/News/SADC-chides-Ravalomananas-wife-20120731 ). 
L'ONU est restée silencieuse.
Le «Rapport du Président de la Commission sur la situation à Madagascar» a déjà déclaré que «Mme Lalao Ravalomanana ne remplit manifestement pas les conditions nécessaires " pour être candidat à la présidence de Madagascar. Ceci est basé sur la condition imposant six mois de présence physique à Madagascar pour être éligible.
Seulement, le rapport ne mentionne pas que son absence est liée à sa violente expulsion par Rajoelina en juillet 2012 mais également,  parce que la SADC n'a pas favorisé l’application de l'article 20 de la feuille de route.
La SADC a conspiré avec Rajoelina pour priver une partie de ses droits humains à l'un des principaux adversaires politiques de ce dernier, de façon à augmenter les chances de succès de son propre candidat.

L'Union africaine, dans le communiqué de la récente réunion du Conseil de paix et de sécurité a noté le «Rapport du Président de la Commission sur la situation à Madagascar". Mais l'UA n'a pas commenté les restrictions imposées sur les droits de Mme Ravalomanana, donc elle les ont toléré.

L'Organisation des Nations Unies et le reste de la communauté internationale à Madagascar sont pleinement conscients des restrictions de ses droits imposées à Mme Ravalomanana.   Pourtant,  ils n'ont rien dit, ce qui les rend complices de la SADC pour déni de droits.

Sous le régime de l'apartheid en Afrique du Sud, avec une classe de citoyens qui n'ont pas les libertés fondamentales, les élections n'ont jamais été libres et équitables.   Les élections à Madagascar ne seront libres et justes tant que Mme Ravalomanana reste privée de son droit de participer à la vie politique de son pays.

Article original (cliquez)



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Le GTT INTERNATIONAL, collectif de la diaspora malagasy, dont le siège est à Genève (CH), poursuit un double objectif: la restauration de l'Etat de droit et le rétablissement de la Démocratie à Madagascar. Il prône et oeuvre pour la liberté d'expression, la prise de conscience citoyenne et la mise en place d'une vraie démocratie dont l'exigence première est la tenue d'un processus électoral inclusif, libre et transparent ".