Dans son message aux Evêques, le Pape
François insiste particulièrement sur
l'importance « du bien commun » (richesses
nationales - Fananam-bahoaka) auquel tout Malagasy doit
non seulement prêter attention, mais surtout protéger.
Aussi, le Pape dénonce avec lucidité et vigueur les réalités de la Société malagasy en
invoquant les pillages et dilapidations de ce bien commun telles que les ventes de terres aux étrangers,
les trafics à grande échelle des ressources minières, forestières, etc…
Il dénonce également la corruption généralisée, à l’origine,
dit-il, de la pauvreté extrême actuelle. Il demande clairement à « ses
Chers Frères » de participer activement à la lutte contre ce fléau en
interpellant les responsables politiques.
« Je vous invite […] à interpeller sans crainte l’ensemble de la société
malgache, et en particulier ses responsables, sur la question de la pauvreté,
qui est due en grande partie à la corruption et à un manque d’attention au bien
commun ».
Les droits de l’homme y ont aussi leur place:
arrestations arbitraires, détentions abusives des prisonniers politiques, ou
non assistance à population en danger (faim, insécurité,…).
Le Souverain pontife exhorte les hommes d’Eglise à s’engager davantage dans la vie de la Nation, et de servir de guide auprès des autorités pour la mise en place d’un véritable Etat de droit.
« Il est
important que vous mainteniez des relations constructives avec les Autorités de
votre pays ».
De plus, ce passage est conforme à l’esprit de la
rencontre au Sommet entre Malagasy, initiée par la FFKM, pour une véritable
réconciliation nationale.
Le Pape appelle les hommes d’Eglise et les laïcs à faire
un sursaut collectif, agir avec dignité et refuser toute injustice.
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DISCOURS DU PAPE FRANÇOIS
AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DE MADAGASCAR
EN VISITE AD LIMINA APOSTOLORUM
AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DE MADAGASCAR
EN VISITE AD LIMINA APOSTOLORUM
Vendredi 28 mars 2014
Chers Frères dans l’épiscopat,
C’est pour moi une joie de vous
rencontrer à l’occasion de votre visite ad limina. Je remercie Son
Excellence Monseigneur Désiré Tsarahazana, Président de votre Conférence
épiscopale, pour les aimables paroles qu’il vient de m’adresser en votre nom. À
travers vous j’adresse mon plus cordial salut aux prêtres, aux personnes
consacrées, aux catéchistes et à tous les fidèles laïcs de vos diocèses. Je
souhaite que votre pèlerinage aux tombeaux des Apôtres soit pour vous et pour
vos Églises locales l’occasion d’un renouveau spirituel et missionnaire ainsi
qu’une marque de votre communion avec le Successeur de Pierre et l’Église
universelle.
Je veux d’abord rendre grâce avec vous
pour la vitalité de l’Église à Madagascar, et vous remercier pour votre
courageux et persévérant travail d’évangélisation. Savoir que dans cette œuvre,
que vous accomplissez dans des circonstances difficiles, Dieu a toujours
l’initiative « nous permet de conserver la joie devant une mission aussi
exigeante » (Evangelii gaudium, n. 12). Cette joie trouve sa source dans la
rencontre personnelle avec le Christ et dans l’accueil de son message de
miséricorde. C’est une exigence première pour les évangélisateurs qui ont pour
mission de favoriser cette rencontre du Seigneur avec les hommes et les femmes
auxquels ils sont envoyés.
Chers Frères, votre pays traverse depuis
plusieurs années une période difficile, et il connaît de graves difficultés
socio-économiques. Vous avez exhorté l’ensemble de la société à se reprendre en
vue de construire un avenir nouveau. Je ne peux que vous encourager à prendre
toute la place qui est la vôtre dans ce travail de reconstruction, dans le
respect des droits et des devoirs de chacun. Et il est important que vous
mainteniez des relations constructives avec les Autorités de votre pays. La
recherche de l’unité, de la justice et de la paix vous incombe pour mieux
servir votre peuple, en refusant toute implication dans des querelles
politiques au détriment du bien commun. Que votre parole et vos actes
manifestent toujours votre communion profonde entre vous !
Dans cette perspective, je veux saluer l’engagement
irremplaçable de vos diocèses dans les œuvres sociales. En effet, il y a une
connexion intime entre évangélisation et promotion humaine. Celle-ci doit
s’exprimer et se développer dans toute l’action évangélisatrice (cf. Evangelii gaudium, n. 178). Je vous encourage
donc à persévérer dans l’attention que vous portez aux pauvres, en soutenant,
matériellement et spirituellement, tous ceux qui s’y consacrent, en particulier
les Congrégations religieuses que je remercie de grand cœur pour leur dévouement
et pour le témoignage authentique qu’elles rendent à l’amour du Christ pour
tous les hommes. Je vous invite aussi à interpeller sans crainte l’ensemble de
la société malgache, et en particulier ses responsables, sur la question de la
pauvreté, qui est due en grande partie à la corruption et à un manque
d’attention au bien commun.
L’éducation est aussi pour vous un sujet
d’efforts considérables, et je sais tout le bien que fait l’école catholique
aux jeunes et à leurs familles, par son action évangélisatrice. L’apport
intellectuel, culturel et moral qu’en reçoit l’ensemble de la société malgache
est considérable. Il convient aussi d’essayer de faire en sorte que le plus
grand nombre possible d’enfants, y compris des familles les plus modestes,
puisse être scolarisé, alors qu’en raison des difficultés économiques beaucoup
de parents n’en ont plus les moyens. De même, je vous invite à œuvrer pour
qu’une présence chrétienne puisse être assurée dans les établissements publics.
Puissent les chrétiens engagés dans le monde de l’éducation contribuer à former
aux valeurs évangéliques et humaines les jeunes générations qui seront aussi
les cadres de la société à venir !
Dans votre message de clôture de l’Année
de la Foi, vous avez regretté la perte de la vraie fihavanana,
cette manière de vivre propre à votre culture, qui favorise l’harmonie et la
solidarité entre Malgaches. Les valeurs que le Créateur a insufflées dans votre
culture doivent continuer à être transmises en les illuminant de l’intérieur
par le message évangélique. Ainsi la dignité de la personne humaine, la culture
de la paix, du dialogue et de la réconciliation pourront retrouver toute leur
place dans la société en vue d’un avenir meilleur.
Vous avez mis en œuvre, dans vos
diocèses, un programme de formation à la vie et à l’amour, ambitieux et très
dynamique. Je ne peux que vous encourager à persévérer dans cette voie, même si
cela semble aller à contre courant de la mentalité actuelle. La préparation au
mariage doit, autant qu’il est possible, être approfondie. Alors que de
nombreuses menaces pèsent sur la famille, cellule vitale de la société et de
l’Église, celle-ci « a besoin d’être protégée et défendue, pour qu’elle rende à
la société le service qu’elle attend d’elle, c’est-à-dire lui donner des hommes
et des femmes capables d’édifier un tissu social de paix et d’harmonie » (Africae munus, n. 42). De plus, les
familles ont besoin plus que jamais d’être soutenues sur leur chemin de foi.
Puissent-elles trouver persévérance et force dans la prière, l’écoute de la
sainte Écriture et les sacrements !
Face aux nouveaux défis dans le domaine
interreligieux, il me semble urgent de développer, et même parfois d’initier,
un dialogue lucide et constructif, afin de garder la paix entre communautés et
de favoriser le bien commun. Mais surtout, je vous invite à ne jamais douter du
dynamisme de l’Évangile ni de sa capacité à convertir les cœurs au Christ
ressuscité, et à conduire les personnes sur le chemin du salut qu’elles
attendent au plus profond d’elles-mêmes.
Pour cela il est nécessaire que la foi
dont témoignent les chrétiens soit vécue au quotidien. La vie doit être en
cohérence avec la foi pour que le témoignage soit crédible ; aussi je vous invite
à susciter dans vos communautés, à tous les niveaux, un travail
d’approfondissement de la foi pour la vivre de manière toujours plus
vigoureuse. Cette invitation s’adresse d’abord au clergé et aux personnes
consacrées. Le sacerdoce comme la vie consacrée ne sont pas des moyens
d’ascension sociale, mais un service de Dieu et des hommes. Une attention toute
particulière doit être portée au discernement des vocations sacerdotales et
religieuses aussi bien dans les diocèses que dans les divers Instituts de vie
consacrée. La chasteté et l’obéissance sont à considérer avec très grande
estime, il vous revient de le rappeler sans cesse ; ces vertus doivent être
présentées et vécues sans ambigüité par les formateurs dans les séminaires et
les noviciats. Il en est de même pour le rapport aux biens temporels et à la
prudence dans leur gestion. Le contre témoignage en ce domaine est
particulièrement désastreux en raison du scandale qu’il provoque, en
particulier face à une population qui vit dans le dénuement.
Vous avez aussi le devoir de vous faire
proches et de porter une grande attention à la vie et à la situation de chacun
de vos prêtres, dont les conditions de vie sont parfois très dures, en raison
de la solitude, du manque de moyens, de l’ampleur de la tâche, et qui se
trouvent particulièrement exposés. Je les assure de mon estime et de mes
encouragements dans leur mission, afin qu’ils soient des pasteurs selon le cœur
de Dieu, proches des fidèles et soucieux de leur annoncer la Parole de vie.
Chers Frères Évêques, aimez vos prêtres, aidez-les à vivre en union intime avec
le Christ ! La communion entre vous et votre presbyterium est
une source de joie et de fécondité dans l’annonce de l’Évangile.
Que le Seigneur continue de répandre sur
vous ses grâces de lumière, de courage et de force ! Pour ma part je vous
engage à vivre toujours dans l’espérance qui nous vient de la présence du
Ressuscité et je vous redis mon affection fraternelle. Je confie chacun de
vous, ainsi que tous vos diocésains, à la protection et à l’intercession
maternelle de la Vierge Marie et je vous donne de tout cœur la Bénédiction
apostolique.
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